L’aidant-aide autorisé à violer le droit du travail ?

C’est en ma qualité de praticien expérimenté en droit qu’il m’est aujourd’hui donné l’opportunité d’émettre mon avis sur l’article 29 du projet de loi enregistré à la présidence de l’assemblée nationale le 18 janvier 2018 et modifié en première lecture par le Sénat, destiné à renforcer l’efficacité de l’administration pour une relation de confiance avec le public.

Il se trouve en effet que je me suis déjà penchée sur le délit de marchandage ou prêt de main d’œuvre illicite qui consistent peu ou prou en un prêt illicite de main d’œuvre d’une société à une autre, dès lors qu’il permet d’éluder l’application des dispositions de la loi, de règlement ou de convention ou accord collectif de travail » (cf. art. L. 125-1 du Code du travail).

Or, le titre II dudit projet de loi prévoit en son article 29, l’expérimentation d’un « relayage » au domicile qui permet d’assurer la continuité de l’accompagnement d’une personne âgée en perte d’autonomie à son domicile pendant plusieurs jours successifs.

Il s’agit en effet de répondre au besoin de relayer les aidants dont la charge est la plus lourde, étant donné que les personnes qu’ils aident ont besoin d’une présence ou de soins constants à leur domicile et ce, en sollicitant l’affectation à son domicile d’un salarié d’établissements ou de services médico-sociaux.

Ce dispositif déroge aux règles du droit du travail tant en ce qui concerne le temps de travail que la durée du repos quotidien.

Il suffit pour s’en convaincre de constater qu’il est prévu que la totalité des heures accomplies pour le compte des établissements ou services par un salarié ne peut excéder un plafond de 48 heures par semaine en moyenne alors que l’appréciation du plafond inclut l’ensemble des heures de présence au domicile et même sur le lieu de vacances lorsqu’il s’agit des séjours dits de répit aidants-aidés.

Mais il y a pire puisque les salariés bénéficieraient au cours de chaque période de 24 h d’une période minimale de repos de 11 heures consécutives qui peut être supprimée.

C’est ainsi qu’un paradoxe évident apparaît dans la mesure où le sous-traitant qui supprime l’ancienneté d’un salarié détaché est sanctionné pour avoir commis le délit de marchandage et peut devoir régler une amende entre 30 et 150.000,00 € mais que l’aidé-aidant peut supprimer le temps de repos du salarié détaché en toute impunité (cf. article L 152-3 du Code du travail).